Dimanche 6 mai 2018
Après avoir passé une agréable nuit dans notre hutte à Pe’une, nous partons avec les amis à la découverte de la côte de Mare. La petite équipe est composée d’un collègue du lycée et sa femme et d’un ami à eux de passage en vacances sur le caillou. Fil directeur de la journée : snorkeling sur les différentes plages entre Nece et Eni. Nous avons de la chance, la journée s’annonce belle et le soleil au beau fixe ! Après le petit village de Nece, première halte sur la plage de Mebuet, une jolie petite baie encerclée par des rochers dominés par de majestueux pins colonaires. Il est encore tôt et la plage est déserte, seuls deux balbuzards paradent au-dessus de nous tandis que des tortues vertes prennent tour à tour leur respiration.
La première partie de la baie est constituée par un herbier où viennent s’alimenter les tortues. Merci à Eric Dercamp pour ses photos sous-marines !
En continuant vers la sortie de la baie nous arrivons au platier multicolore. Alors que le soleil illumine les coraux aux couleurs vives j’arrive au-dessus du tombant. Un bleu nuit, profond, où disparaissent des groupes de dawa, clôt la baie. De toutes les choses que j’ai vues jusqu’à présent, je pense que c’est ici, à Mébuet que j’ai été le plus touchée par la beauté d’un paysage. Ce spectacle grandiose mêlé à une espèce d’angoisse face aux profondeurs nous renvoie à notre propre fragilité. Ici je peux dire que j’ai goûté au sentiment du sublime, ce qui, pour une lectrice de Kant, ne se dit pas à la légère. Le sublime est lié au concept d’infini. Le caractère infini du paysage qui me dépasse fait écho au pouvoir infini de la raison qui est en moi. Il ne suffit pas de contempler un “beau” paysage pour être touché par le sublime, encore faut-il que ce paysage soit assez grandiose pour éveiller en moi le sentiment d’infini : “La nature est ainsi sublime dans ceux de ses phénomènes, dont l’intuition suscite l’Idée de son infinité” (Kant, Critique de la Faculté de juger). Au-delà des limites de cette baie, c’est bien une rencontre avec l’infini qui m’attendait. Petite vidéo pour vous donner une idée du cadre, mais, bien entendu, en-deçà de l’expérience vécue. Le sublime est de plus à chercher non dans l’objet mais dans le sujet percevant, et chacun n’est pas touché par les mêmes phénomènes. Certains donc trouveront ce site seulement “beau” !
A cette expérience du sublime, ajoutons ce moment de grâce, celui de cette rencontre avec une tortue verte, qui venant de l’océan pour emprunter le chenal permettant d’accéder à la baie est restée paisible autour de moi. Je remercie au passage Laurent qui m’avait prêté sa go pro ce qui m’a permis de réaliser ces images.
La matinée commence plutôt bien ! De retour sur la plage, nous prenons le temps de nous sécher au soleil tandis qu’une Aigrette sacrée pêche non loin de nous. Je troque la go pro contre mon 100/400 et c’est parti pour une série de photos un peu ornitho …
Nous reprenons la route et arrivons au port de Tadine dont la baie turquoise est digne des plus jolies cartes postales !
Nous passons devant la tombe du leader indépendantiste Yeiwéné Yeiwéné qui fut assassiné à Ouvéa avec Jean-Marie Tjibaou en 1989, souvenir encore bien ancré et vivant dans le contexte actuel, à l’aube du référendum. Ici, on ressent bien que la lutte pour l’indépendance n’est pas terminée.
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Dernière escale de la matinée : l’aquarium naturel, bien indiqué et facile d’accès, ce trou d’eau particulièrement limpide est interdit à la baignade mais vous pourrez admirer de nombreux poissons depuis le bord. Habitués à être nourris, ils ne sont pas très farouches et les guides conseillent de prendre du pain avec vous pour les attirer … Mais j’ai passé assez de temps avec les agents du parc national de Port-Cros pour savoir que nourrir les poissons avec du pain n’est vraiment pas une bonne idée … Oubliez donc le pain … ils viennent au bord même si vous jetez une feuille !
Nous prenons notre repas au buffet de l’hôtel Nengone, ambiance de zoreille contrastant avec les drapeaux Kanaki flottant un peu partout sur l’île ! Les plats sont assez variés et de qualité, je ne raffole pas de ce genre de cadre touristique, mais il faut avouer qu’il y a assez peu d’endroits pour manger à Maré et se poser avec les amis à table c’est très sympa aussi. On a même droit à un orchestre local aujourd’hui !
Après le repas, nouvelle session de snorkeling dans la baie devant l’hôtel, quelques patates sympas et de jolis poissons. Eric nous trouve même un pointe blanche, tranquillement posé au fond, qui ne bougera pas à notre passage. Ici on ne dit pas y anguille sous roche mais requin sous patate !
Nous reprenons la route mais n’allons pas bien loin, nouvelle plage, nouvel arrêt, à nouveau nous enfilons palmes masque tuba, le geste est bien rodé. Nous voilà sur la plage de Wabao. Malheureusement les coraux sont bien plus abîmés, c’est ici que les paquebots australiens font escale. Mais je me suis bien amusée dans le labyrinthe formé par les récifs. C’est toujours surprenant, quand, au détour d’un rocher, on tombe nez à nez avec une tortue !
C’est déjà l’hiver et la journée avance vite, nous nous dépêchons de filer à notre dernière étape : la plage d’Eni, charmant village marquant la fin de cette route longeant la côte ouest de l’île.
C’est parti pour la dernière baignade du jour tandis que la lumière devient rasante … Nous survolons une forêt de branchus jusqu’au tombant. L’eau est assez trouble et les massifs rocheux aux vastes arches impressionnants … ce n’est peut-être pas le meilleur moment pou se baigner ici … nous ne nous y attarderons pas … nous nous regardons tour à tour à travers les masques … on s’est compris, il est plus sage de faire demi-tour ! Une dernière surprise nous attend cependant : rencontre avec un diodon.
Nous finissons la journée sur cette plage du bout du monde. Le soleil décline sur Mare qui semble s’embraser. A ce moment là je pense à vous, mes amis de métropole : une nouvelle journée va bientôt commencer pour vous, profitez en bien ! Pour nous, nous rentrons de nuit à Pé’une où Louise nous aura concocté un bon petit plat !