Avec un peu de retard, le compte-rendu de nos deux journées glaciales autour de la lagune de Gallocanta en Aragon pendant les vacances de Noël. Ce site accueille l’hivernage des grues cendrées, c’est un peu le lac du Der espagnol en miniature. Des rencontres et des ambiances originales !
2 janvier 2015
Nous avons quitté l’Andalousie dans l’après-midi. 600 km nous séparent de notre prochaine destination : les plaines de l’Aragon et la lagune de Gallocanta, réputée pour accueillir l’hivernage de Grues cendrées. Gallocanta, le Chantecoq espagnol. Nous arrivons vers 22h, le thermomètre affiche -6° … la matinée s’annonce froide !
Effectivement, au réveil, le verdict tombe : -8° alors que le soleil n’est pas encore levé, puis -10° avec les premiers rayons. Nous partons à l’aube à la recherche d’un bon point de vue pour admirer l’envol des grues, spectacle qui a fait la renommée de ce site perdu au milieu des plaines désertiques de l’Aragon. Nous optons finalement pour le mirador d’El Canizar. Bon choix. Vers 8h, les groupes de grues quittent la lagune et passent au-dessus de nos têtes en trompétant. A peine 30 mn plus tard, l’ambiance s’apaise. Les oiseaux se sont dispersés à travers les champs alentours ou derrière les collines, seuls quelques irréductibles demeurent les pieds dans l’eau.
Nous entamons le tour de la lagune grâce aux routes et aux pistes qui sont ici nombreuses. Des chevreuils, nous en dénombrerons 14, parcourent les champs givrés tandis qu’un renard maraude.
A perte de vue, s’étendent des labours aux teintes rouges ponctuées du gris bleuté des grues auxquels succèdent le vert tendre des champs de blé. Les rares zones laissées en jachère sont occupées par des groupes mixtes de Linottes mélodieuses et de Moineaux soulcies. Parfois, ils sont plus de 200 à se partager le même lopin de terre. Au passage d’un Busard st Martin, et ils sont assez nombreux dans les environs, tout ce petit monde s’envole. Nous découvrirons le soir même un dortoir de ces busards se rassemblant peu avant la tombée de la nuit sur les rivages nus de la lagune. Ils patientent là puis profitant de la pénombre, un dernier envol discret leur permet de rejoindre l’abri de la roselière. Ils ne quitteront cet abri qu’au petit matin lorsque les toutes premières lueurs du jour apparaissent sur l’horizon. Pour trouver les fameuses steppes de l’Aragon, il faut rejoindre les buttes et les sommets des collines, seuls endroits ayant été épargnés par l’agriculture.
Ces zones constituées d’une végétation éparse et rase, adaptée au rude climat local, servent encore de parcours pour les troupeaux d’ovins. Quelque soit l’endroit où l’on porte notre regard dans ces paysages, il est difficile de ne pas tomber sur des ruines, vestiges d’un temps où les activités pastorales étaient florissantes. Aujourd’hui ces bergeries et ces petits cabanons font le bonheur des Chevêches d’Athéna et des Moineaux Soulcies.
Dans les maigres parcelles de steppes, quelques alouettes calandres tentent de se cantonner et profitent de la douceur de la journée pour commencer à chanter. Pourtant l’hiver n’est pas encore fini… Nous passons l’après midi à parcourir les pistes à la recherche de gangas ou d’outardes. Les concentrations ne semblent pas très élevées et nous ne parviendrons à apercevoir des gangas qu’en fin de journée. L’observation sera assez rapide. Un petit groupe de 12 individus décollent d’un labour situé en contrebas d’une bergerie, nous contournent de très loin et disparaissent derrière la colline. Nous aurons juste le temps de voir la forme typique des gangas et le ventre noir caractéristique des unibandes. Dans un labour fraichement retourné, buses et Milans royaux guettent les petits rongeurs fraichement débusqués.
Alors que le soleil décline, nous nous retrouvons au bord de la lagune en compagnie des busards. Nous patientons dans le froid jusqu’au retour des grues qui se font attendre. Alors que les dernières lueurs du jour embrasent le ciel derrière nous, les premières grues arrivent et se posent au milieu de la lagune. Les vols se succèdent puis le silence tombe. Tout le monde est arrivé, il est temps pour nous d’aller chercher la chaleur de l’auberge de Gallocanta.
La vie ne s’arrête pas pour autant avec la nuit. Sur le chemin menant au village, un renard, une bécassine, un lapin et même un Hibou des marais se laisseront observer, parfois dans d’excellentes conditions !
03 janvier 2015
Au petit matin, nous rejoignons un couple de photographes français près de l’observatoire de la Ermita pour profiter du spectacle de l’envol des grues. Nous sommes de l’autre côté de la lagune, là où, parait il, les lumières sont les plus belles. En effet, c’est un tout autre spectacle auquel nous assistons ce matin. Le ciel d’un bleu profond évolue vers le violet puis à l’orange vif alors que les grues prennent leur envol.
La majeure partie des grues filent vers le Sud-ouest mais quelques vols passent à proximité de notre point d’observation, nous permettant de profiter pleinement du spectacle qu’elles nous offrent. La lagune s’est vidée de ses grues, nous reprenons les pistes, l’occasion de croiser deux renards couchées au sommet d’une cathédrale de balles de paille, des groupes de passereaux, un mâle de Faucon émerillon mais toujours pas de ganga.
Détour par la lagune de Zaida, une autre lagune endoréique située au nord de Gallocanta mais elle est à sec. En fin de matinée, nous décidons qu’il est temps pour nous de quitter ce lieu, de commencer à nous rapprocher de la France non sans effectuer un dernier détour. Direction Calamocha et sa sierra pour tenter d’observer nos derniers Bouquetins ibériques. Nous parviendrons en milieu d’après-midi à observer un groupe au sommet d’une petite falaise en bordure de route. Un beau mâle, fier comme un espagnol, se laissera photographier ! olé
Nous amorçons notre retour vers la France, 8 heures de route nous attendent.
Gallocanta :
- Liste des oiseaux : Busard st Martin (14), Busard des roseaux (3), buse variable, Milan royal (5), faucon crécerelle, Faucon pèlerin (1), Faucon émerillon (2), Grue cendrée (3000), courlis cendré (1), vanneau huppé, Canard colvert, Tadorne de Belon, Canard pilet (3), Sarcelle d’hiver (>10), Canard siffleur (10), Oie cendrée (12), Héron garde-boeuf, Ganga unibande (12), Perdrix rouge, Moineau soulcie (>300) , Moineau friquet, Cochevis huppé (5), Alouette calandre (150), Alouette des champs, Hibou des marais (1), Chevêche d’Athéna (6), Linotte mélodieuse, Pie-grièche méridionale, Rouquequeue noir (2), Tarier pâtre (3), Bruant proyer , Bruant des roseaux, Merle noir, Tourterelle turque, Grand corbeau (2), Pie bavarde, Geai des chênes, Corneille noire.
- Liste des mammifères : Sanglier (1), Chevreuil (14), Renard (6), Lapin (3)
Sierra de Calamocha
- Liste des oiseaux : Pie-grièche méridionale, Faucon crécerelle, Busard des roseaux, Milan royal, Vautour fauve (20), Fauvette pitchou, Mésange à longue queue, Pinson des arbres, Cochevis huppé
- Liste des mammifères : Bouquetin ibérique (5)
2 Comments
mach
Bonjour
très bon compte rendu d’un séjour un peu frisquet.
Je souhaiterai passer quelques jours à Gallocanta pour peindre les grues. Mais avant de faire le déplacement, j’aimerai savoir s’il est possible de les approcher dans de bonnes conditions, sachant bien sûr que je dispose d’un télé?
Merci encore pour ces superbes photos.
Sincèrement
Pierre
admin
Bonjour Pierre, merci pour votre commentaire. Les points d’observation sur la lagune sont assez loin. Comme on le voit sur les photos, les grues sont assez loin et il n’est pas possible de s’approcher du point d’eau. En revanche, on peut aussi les observer dans les champs alentours lorsqu’elles se nourrissent au cours de la journée et il arrive qu’elles se laissent observer à distance convenable de l’observation (à condition de ne pas sortir de la voiture !) Bonne chance ! Amitiés naturalistes. Sophie