Ammomane élégante sur Gruissan

Samedi 27 mai, nous avons pris la direction de l’Aude et la ville de Gruissan à la recherche d’une petite alouette découverte le week-end dernier. Sur le lido de Mateille, entre plage et dune végétalisée, stationne une Ammomane élégante Ammomanes cinctura.

Nous arrivons sur site vers 10h15. Le temps est gris, des entrées maritimes sont bien présentes et la nébulosité donne naissance à une petite bruine. Pas vraiment les conditions qui étaient annoncées la veille sur un site officiel de météo. Avantage pour nous, il n’y a pas beaucoup de promeneurs et nous pouvons nous mettre en quête de la belle. Un couple de Cochevis huppés se tient sur le parking et les chants d’Alouettes calandrelles nous parviennent depuis l’arrière plage. Un à deux oiseaux égrène le chant si caractéristique de l’espèce haut dans le ciel tandis que deux autres cherchent pitance au sol.

Une autre alouette aux couleurs chaudes fait une brève apparition entre deux touffes d’herbes. C’est surement l’Ammomane ! Nous préférons assurer l’identification avant d’annoncer l’espèce. On se décale mais malgré notre recherche nous n’arrivons pas à la retrouver. Retour vers notre première position et l’oiseau s’est en fait rapproché. Petit film, série de photos et superbe observation aux jumelles et à la longue-vue. L’oiseau s’envole et rejoint une partie de dunes qu’il semble particulièrement affectionner. Nous la retrouvons derrière un tamaris, on prend position et l’on attend. Sans cesse en mouvement, elle arpente tout son territoire attrapant tous les insectes qui croisent sa route. Chemin faisant, elle se rapproche de nous, indifférente à notre présence, passe à moins de 5 m puis s’éloigne lentement. Presque parfait, seule une belle lumière fait défaut, les nuages masquent le soleil.

20 minutes plus tard, légères éclaircies sur la zone. Un groupe de Martinets noirs accompagné de quelques pâles vient chasser juste au dessus de l’Ammomane qui s’était quelque peu assoupie, couchée auprès d’une touffe d’herbe. Inquiète, elle jette constamment des regards vers le ciel, se faisant surprendre régulièrement par les véloces « sans pied» (Apus en latin…).

Elle décide de se remettre en chasse, capture une espèce de Tipule qu’elle mettra quelques instants à ingurgiter. Petits insectes et graines font partie de son régime alimentaire.

Encore une fois, notre immobilité est récompensée, l’Ammomane vient vers nous et cette fois passe à moins de 2 m ce qui oblige à modifier les réglages de l’appareil en le passant en mode macro … Plus de 3 heures d’observation pour cette espèce qui est une première mention française. Une petite tête ronde, un bec court mais assez puissant, une courte projection primaire sombre, un bord de fuite des rectrices noir et un plumage fauve-orangé que l’on ne rencontre chez aucune des espèces d’Alouettes  européennes, voila pour les principaux critères d’identification.

Décrite la première fois par Charles Darwin lors de sa visite des îles du Cap vert, L’Ammomane élégante est une espèce que l’on rencontre dans le biome saharien, recherchant les milieux arénicoles avec présence d’herbacées éparses. Il est toutefois possible de la rencontrer dans des habitats de type regs et hamadas.  Adaptée aux rudes conditions de ces milieux hostiles, elle est contrainte de s’abriter des ardeurs du soleil durant les heures chaudes en se réfugiant dans des terriers d’Uromastyx. Son aire de répartition bien que fragmentée, couvre une large  partie de l’Afrique saharienne mais aussi plus à l’est la péninsule Arabique et atteint le Pakistan et l’Afghanistan à son extrémité orientale. Strictement sédentaire, seule une toute petite partie de la population peut se disperser en dehors de la période de reproduction en recherchant des zones moins arides. En Afrique, la période de reproduction est dépendante des précipitations. Dans le nord de son aire de répartition, les pontes ont lieu entre janvier et avril (Maroc ) tandis qu’au Cap vert, c’est entre juin et septembre. La propension à la sédentarité chez cette espèce explique le faible nombre d’observation en Europe.  Seuls deux pays étaient concernés, l’Italie avec au moins deux mentions, une provenant d’un oiseau tué dans les années 1970 et la deuxième (correspondant au premier oiseau vivant) date d’avril 2012 dans la région de Syracuse en Sicile (A. Corso et B.J. Small). Le même mois de cette même année, un oiseau a été contacté sur l’île de Malte.

Cette donnée française constituerait donc seulement la 4^ème mention européenne.

 

Bibiographie :

• http://www.arkive.org/bar-tailed-lark/ammomanes-cinctura/
• http://birdingfrontiers.com/category/10-larks/
• Xeno-canto