L’été touche à sa fin
A la recherche des cétacés à la fin du mois d’août. Dimanche fin août. Me voilà de retour de vacances et aussitôt réembarquée à bord de La Croix du Sud V avec Découverte du vivant. L’été a été très fructueux avec de nombreuses observations. La veille l’équipe a eu droit a une journée inoubliable avec 6 espèces dont globicéphale et dauphin de Risso. Complètement dingue. C’est donc pleine d’espoir que je monte à bord du navire. Quelles surprises la mer nous réserve-t-elle aujourd’hui ? Les conditions d’observation sont optimales et, malgré la canicule annoncée, l’air marin rend les températures plus supportables. Nous dépassons l’île des Embiez au bout de laquelle les cormorans huppés restent immuablement postés. La période de reproduction des oiseaux est terminée et les individus commencent à se disperser. Nous croisons ainsi plusieurs sternes pierregarin ainsi que des sternes caugeks.
Autre signe de la fin de saison : l’arrivée des thons qui forment des “chasses”. Piégeant les petits poissons en les repoussant vers la surface, il ne leur reste plus qu’à se servir. On les voit alors s’agiter et sauter hors de l’eau. Cette agitation ne laisse pas les oiseaux indifférents qui comptent bien participer au festin. Sternes et puffins se rassemblent et plongent pour récupérer ce qu’ils peuvent. Pas facile la vie pour ces petits poissons !
Des dauphins bleu et blanc accompagnés de leurs jeunes
Cette affluence de nourriture s’explique en partie grâce à l’existence du courant ligure qui s’enroule autour de la Corse et ramenant ces denrées. Cela explique également l’importante densité de cétacés dans nos eaux durant l’été. Nous ne tardons d’ailleurs pas à croiser notre premier groupe de dauphin bleu et blanc de la journée, le cétacé le plus commun ici. Joli tableau que ces dauphins bondissant dans la lumière du matin.
Il s’agit d’un groupe de femelles accompagnées de leurs jeunes. Nous nous tenons à distance. Certains, plus curieux viennent jouer quelques instants autour du navire avant de retourner chasser. Il y a quand même des priorités dans la vie !
Toujours plus au sud
Nous poursuivons notre route, toujours plus au sud afin d’atteindre la plaine abyssale à la recherche des grands souffleurs. L’objectif : trouver le deuxième plus grand animal au monde à savoir le rorqual commun. Même si les individus de Méditerranée sont en moyenne plus petits que les autres rorquals communs à travers le monde, ils peuvent néanmoins mesurer près de 20m ! La population méditerranéenne est estimée à 3000 individus dont 1/3 viendraient se nourrir dans nos eaux durant la période estivale. Malgré leur taille imposante, ils savent se faire très discrets. C’est grâce à leur puissant souffle, haut et droit, que nous les repérons. Il peut en effet monter jusqu’à 8m de haut ! Avec une mer comme aujourd’hui, on ne devrait pas passer à côté. D’ailleurs Nous finissons par en apercevoir un ! Baleine en vue !
Nous rejoignons l’animal, toujours dans le respect des règles du label High quality whale-watching. N’hésitez pas d’ailleurs à jeter un œil à mon article Comment bien choisir son opérateur Whalewatching à ce sujet. Il continue paisiblement sa route, se ventilant en surface. Il accélère, mouvement qui annonce sa sonde prochaine, il arque le dos de façon prononcée et disparaît sous la surface laissant derrière lui une large tâche d’huile.
C’est partie pour une attente généralement autour de 8 mn. Celle-ci est ponctuelle. Le capitaine de La Croix du Sud, très expérimenté, a anticipé le déplacement de l’animal en fonction de son allure. Voilà la baleine qui ressurgit par loin du navire sous les yeux ébahis des visiteurs.
Contrairement aux cétacés à dents qui n’ont qu’une seule narine, les “vraies” baleines, celles qui ont des fanons et que les scientifiques appellent les mysticètes, en possèdent deux, comme on le voit très bien sur cette image ! Mais en scrutant l’horizon, nous ne tardons pas à voir d’autres souffles. Au final, nous croiserons la route de 5 rorquals au cours de cette sortie.
Un groupe de cachalots
Nous laissons nos baleines pour tenter de retrouver un autre grand souffleur signalé par un autre observateur : le cachalot. Malgré sa taille imposante, il ne s’agit pas d’une baleine mais ce cétacé est plus proche du dauphin. Cette fois-ci il s’agit d’un cétacé à dents, un odontocète. Nous finissons par retrouver les animaux grâce à l’un d’entre eux effectuant un saut loin sur l’horizon. Par chance ils sont toujours en surface. Nous comptons 4 individus sur la zone, deux d’entre eux nageant à proximité l’un de l’autre.
Comme je vous le disais juste avant, le cachalot est un cétacé à dent et ne possède qu’une seule narine. Celle-ci est d’ailleurs orientée vers la gauche, ce qui donne au cachalot un souffle caractéristique de biais et en forme de buisson. Même à grande distance, il est ainsi possible de savoir si l’on a à faire à un rorqual ou à un cachalot.
Autre façon de distinguer baleine et cachalot : lors de sa sonde, le cachalot sort sa queue en forme de cœur hors de l’eau ce qui lui permet de plonger pratiquement à l’horizontal, en canard. Champion en apnée, il peut rester près de 45mn et remonter dans la même zone. Mais nous avons de la chance, lorsqu’ils sont en groupe, les apnées durent moins longtemps.
On prend les mêmes et on recommence
En fin de journée nous repartons en mer pour accompagner un nouveau groupe. Nous recontactons les mêmes espèces dans les mêmes zones. C’est une chance car il n’est pas toujours garanti de les retrouver. Quelques dauphins profitent de notre vague arrière pour surfer. Le spectacle est toujours
Tandis que les passagers admirent les dauphins, l’un d’eux aperçois en direction de la terre un souffle. C’est un cachalot, deux autres apparaissent dans la zone. Il faut vraiment chercher dans toutes les directions !
Nous allons à la rencontre de l’animal qui se ventile tranquillement en surface. Une belle observation de qualité, comme on les aime.
Après avoir pris sa respiration, c’est reparti pour la sonde. C’est le signal pour nous de reprendre notre route.
Nous rejoignons la plaine abyssale où les rorquals semblent nous avoir attendu. Deux individus nagent côte à côte, soufflant pratiquement en même temps.
Ethique et whalewatching
Les passagers sont ravis. Les baleines nagent le long du bateau. J’abandonne l’appareil pour profiter aussi du spectacle. Nous sommes chanceux d’y assister. Il faut savoir parfois poser l’objectif et juste regarder. Alors que le bateau est plein, tout le monde spontanément se tait. Nous entendons nettement le souffle profond de ces mammifères marins ne manifestant aucune inquiétude. Souvent on me questionne sur la légitimité de ces sorties whalewatching pour le grand public. Je suis convaincue que si les approches sont respectueuses, l’impact est négligeable. En revanche les répercutions en termes de sensibilisation et d’éducation à l’environnement sont importantes et très positives. L’information brute ne suffit pas. L’expérience en revanche est marquante. Il est indéniable que les personnes qui ont participé à cette sortie fantastique ne regarderont plus la mer de la même façon.