Dimanche 27 décembre 2015 (Après midi)
Pour cette deuxième journée sur Kaolack, après les observations matinales d’Elanions, nous partons prospecter la brousse au sud du Saloum en direction de la Gambie. Durant les premiers kilomètres, les paysages que nous traversons sont ceux des tannes où l’influence saline du Saloum se fait sentir. Les paysages sont alors ouverts, le taux de recouvrement du sol par la végétation est faible et les oiseaux peu présents. Dès que le milieu évolue vers des zones agricoles parsemées de prairies et de pâtures, les Elanions nauclers et les Faucons crécerellettes font leur apparition. Si nous avons eu du mal hier à trouver les zones de brousse exploitées par ces deux espèces, aujourd’hui, nous les trouvons assez facilement le long de la route. Très souvent c’est un premier individu que l’on repère en roulant ce qui nous incite à nous arrêter. Le balayage systématique des environs permet de détecter entre 2 et 4 individus supplémentaires à plus grande distance.
Ici aussi la route est en chantier et nous roulons sur une voie secondaire toute poussiéreuse. Dans un S de la route, nous trouvons un espace de dégagement pour nous arrêter et détailler les oiseaux au bord d’un marigot. Des gamins pêchent dans un petit chenal et un peu plus loin, ce sont trois espèces d’aigrettes qui font de même. Une Grande aigrette, trois garzettes et deux récifs, sous l’œil d’un couple d’Alcyon pie. Ce chenal de communication entre deux mares doit être propice à la capture de petits poissons en transit.
Sur la mare principale, se mélangent Pélicans blancs et gris. C’est la première fois que nous observons les deux espèces côte à côte, ce qui est une excellente opportunité pédagogique. Différence de taille flagrante, teinte du plumage des deux espèces bien distincte, couleur du bec … bref un arrêt intéressant. En traversant un village, nous tombons sur un groupe de 6 Vautours charognards cerclant juste au dessus des habitations. Cette espèce commensale de l’Homme exploite ses déchets et profite du fait que c’est dans les villages que l’on trouve encore une grande variété d’arbres propices à la nidification. En sortie du même village, une Mangouste à queue blanche n’a pas eu de chance. Elle a été percutée par une voiture et gît au milieu de la piste. C’est une nouvelle espèce de mammifères pour notre voyage au Sénégal mais ce n’est pas dans ces conditions que nous aurions aimé la voir. Principalement nocturne, elle est donc difficile à observer lors de nos déplacements diurnes. Nous roulons sur de nombreux kilomètres avant de trouver un endroit où nous puissions nous arrêter pour pique-niquer. Il faut s’éloigner de la piste pour ne plus être sous l’influence de la poussière que soulève le passage du moindre véhicule. Aujourd’hui, pas besoin de chercher de l’ombre pour prendre notre repas, le ciel est bien gris et la lumière très faible. Au bout de quelques minutes, nous contactons enfin des oiseaux. Le premier est un magnifique mâle de Souimanga à poitrine rouge. Il passe de fleurs en fleurs, puis est rejoint par une femelle.
Tous deux s’envolent vers l’arbre voisin ce qui nous permet de tomber sur une autre poitrine rouge mais cette fois appartenant à un Barbican. Un bel oiseau au plumage surprenant. Le bec est imposant et le disque oculaire jaune d’une taille inhabituelle …
Le passage au sud du fleuve Saloum est marqué par l’évolution de la végétation ainsi que de l’avifaune. Depuis le Djoudj aux portes du désert au sud du Saloum la transition est flagrante sur seulement environ 400 kilomètres. On rencontre à présent des espèces à affinité tropicale, adaptée à une végétation plus variée. Le Barbican à poitrine rouge et le Souimanga à poitrine rouge en sont l’illustration. Autre intérêt de cet arrêt, de nombreux Youyous du Sénégal, ces perroquets jaune et vert, viennent conforter cette impression tropicale. Des fourrés voisins émanent des cris puissants. Après plusieurs minutes de recherche, nous trouvons son auteur, un Gonolek de Barbarie qui possède aussi … une poitrine rouge ! En reprenant la voiture, pas le temps de bien s’éloigner que nous détectons une pompe de rapaces dans le lointain. Dans le thermique se mélangent des Vautours africains, charognards, Milans à bec jaune et une nouvelle espèce avec un Aigle de Walhberg. Le Sénégal se dessine au fil des jours somme une excellente destination pour l’observation des rapaces. Nous rallions la ville de Sokone où règne une activité toute africaine. Dans la rue principale, autour des nombreux magasins ouverts s’affairent les locaux. Nous profitons durant quelques minutes de ces ambiances et faisons des courses avant de reprendre notre progression.
Au sommet d’une tige d’un palmier décapité, un oiseau que nous n’arrivons pas à identifier en roulant nous incite à faire demi-tour. Bon choix, c’est une nouvelle espèce nous permettant de compléter notre liste de rollier d’Afrique. Celui-ci, c’est un Rollier à ventre bleu dont la limite nord de son aire de répartition se trouve ici. Comme les autres représentants de son genre, les couleurs chez cette espèce sont un régal pour les yeux !
Si nous le trouvons près de Sokone, c’est en raison de la réapparition d’une forêt. Des grands arbres, des Palmiers mais aussi une grande variété d’autres essences propices à une explosion de vie. Nous trouvons un chemin et partons à sa découverte. Des petits groupes d’Amarantes du Sénégal décollent devant nos pas. Elles sont assez farouches et il faudra patienter pour réussir à photographier un mâle dans sa belle parure. Le reste de la balade se révèle finalement assez calme.
Nous ne sommes pas sur les bonnes heures et cela se ressent. Juste avant de quitter la forêt, nous repérons sur des branches mortes dans le haut d’un arbre un couple de pic. A l’aide du guide, nous identifions un Pic à taches noires. Eux aussi nous ont repérés et tournent autour de l’arbre pour se maintenir en partie cachés. Les oiseaux sont bien présents mais peu actifs.
Prochain objectif du jour, la forêt de Sangako, une forêt classée où un eco-sentier a été réalisé par une association et les villageois. A l’approche de la forêt, la route longe une zone de mangrove. Quelques vanneaux éperonnés se sont rassemblés mais c’est davantage ce qui se tient dans un grand Baobab qui nous intéresse. Une nouvelle espèce de vautour avec ce Vautour palmiste. Il y a deux ans nous avons contacté pour la première fois cette espèce dans une réserve sud africaine située sur la côte indienne (M’tunzini NDLR). Il est remarquable de noter que ce site constitue la limite sud de son aire de répartition. Au Sénégal, au sud de la ville de Sokone, nous sommes parmi les sites les plus septentrionaux. En deux ans, nous aurons eu la chance de fouler les deux extrémités de son aire de répartition. Un deuxième oiseau s’envole d’un arbre où il se maintenait caché et rejoint celui posé au faîte du Baobab. Photo souvenir de ce couple car décidément cette après-midi, la lumière nous aura fait défaut.
Peu avant la forêt de Sangako, un groupe de Singes Patas traverse la route. Il existe visiblement une grande plasticité dans le choix de l’habitat chez ce primate car ici, on est loin des milieux semi-arides et des ambiances du Djoudj.
Nous atteignons notre forêt, classée en réserve depuis 1936.La première impression est positive. La encore de grands arbres, des essences variées, un sous-bois diversifiés et de nombreux chants d’oiseaux sont des indicateurs d’un habitat préservé comme nous n’en avons que très peu vu à travers le Sénégal.
L’emprise de l’homme est omniprésente à travers le pays et la présence d’un important cheptel ovin, caprin ou bovin impose une telle pression sur la végétation que celle-ci a du mal à se reconstituer et notamment le sous-bois. Les arbres sont quand à eux, régulièrement attaqués à coup de machette. Les branches fournies en feuillage servent de fourrage durant la saison sèche au bétail et le bois des branches est utilisé comme combustible. Au fur et à mesure des années, il ne reste plus qu’un tronc et quelques vestiges de branches, annonciateurs d’une fin proche. Après des centaines d’années d’activités humaines, seul persiste dans les paysages sénégalais l’omniprésent Baobab. Son bois gorgé d’eau n’est pas utilisable comme combustible et ne possède pas de propriétés qui puissent être utilisée en ébénisterie ou en construction. Seul intérêt, de cette essence, ses fruits que les gamins tentent de faire tomber à coup de lancers de bâton afin de préparer un jus de fruits.
Ici sur Sangako, c’est une véritable forêt qui se dresse. Nous y pénétrons en suivant un sentier non balisé. De jolis chants flutés d’oiseaux s’élèvent depuis les arbres environnants mais il est très difficile de les voir. Nous passons de longues minutes à tenter de les observer mais la plupart du temps en vain. Des Perruches à collier se perchent au sommet de branches mortes puis se lancent dans des courses-poursuites à travers la forêt. Des cris familiers, ce sont des Guêpiers, non pas Perse ou d’Orient mais d’Europe. Nous sommes là sur les premiers territoires hivernaux de cette espèce et c’est avec un certain plaisir que l’on se laisse bercer par ces cris synonymes de printemps sur nos terres provençales.
Faute de pouvoir observer les oiseaux, on se rabat sur les papillons, nos premiers au Sénégal. Colorés ou mimétiques, ils sont nombreux à voleter le long du chemin. La présence de multiples strates végétales semble être un facteur déterminant dans cette profusion de Lépidoptères. Son corolaire est la richesse en plantes hôtes offrant des sites de pontes pour les femelles adultes et pour les chenilles la possibilité de se nourrir afin d’effectuer les différentes métamorphoses nécessaires pour atteindre le stade imago.
La lumière commence à décliner, nous rebroussons chemin afin de rejoindre la voiture. Un cubla de Gambie se perche le temps faire deux photos et au passage nous faisons décoller un Gymnogène. Celui-ci venait juste de se percher dans un arbre, probablement son perchoir pour la nuit en plein cœur de la forêt. Des perroquets Youyous s’activent aussi et plusieurs vols filent dans la même direction, vers leur dortoir certainement aussi.
Nous repassons devant la zone de mangrove où se tenaient les Vautours palmistes, un individu est encore présent.
Deux heures plus tard, nous arrivons à la tombée de la nuit dans les environs de Kaolack. Une intrigante silhouette dans un arbre mort se révèle être celle d’un Grand-duc de Verreaux. Immobile jusqu’au passage d’une petite troupe de Hérons gardeboeufs, il s’élance à leur poursuite mais nous le perdons dans la pénombre. Dans la lumière des phares de la voiture, nous voyons 4 Mangoustes à queue blanche sur le bord de la route. Ahhh enfin des mammifères vivants … cette obs est bien plus sympa que celle de la fin de matinée ! Vers 20h30, nous sommes de retour à l’hôtel, bien contents de cette journée de découverte des terres du sud du Sénégal.
[su_spoiler title=”Espèces d’oiseaux observés au sud du Sine Saloum” style=”fancy”]
Black Stork | Ciconia nigra | 4 |
Great White Pelican | Pelecanus onocrotalus | X |
Pink-backed Pelican | Pelecanus rufescens | X |
Great Egret | Ardea alba | X |
Little Egret | Egretta garzetta | X |
Western Reef-Heron | Egretta gularis | X |
Osprey | Pandion haliaetus | 1 |
Scissor-tailed Kite | Chelictinia riocourii | 7 |
African Harrier-Hawk | Polyboroides typus | 2 |
Palm-nut Vulture | Gypohierax angolensis | 2 |
Hooded Vulture | Necrosyrtes monachus | 6 |
White-backed Vulture | Gyps africanus | 15 |
Rueppell’s Griffon | Gyps rueppelli | 1 |
Wahlberg’s Eagle | Hieraaetus wahlbergi | 1 |
Milvus migrans parasitus | 3 | |
Black-winged Stilt | Himantopus himantopus | X |
Pied Avocet | Recurvirostra avosetta | 1 |
Spur-winged Lapwing | Vanellus spinosus | 3 |
Black-headed Lapwing | Vanellus tectus | 2 |
Common Greenshank | Tringa nebularia | 1 |
Whimbrel | Numenius phaeopus | 1 |
Black-billed Wood-Dove | Turtur abyssinicus | 3 |
Verreaux’s Eagle-Owl | Bubo lacteus | 1 |
Pied Kingfisher | Ceryle rudis | 4 |
European Bee-eater | Merops apiaster | 7 |
Abyssinian Roller | Coracias abyssinicus | 3 |
Blue-bellied Roller | Coracias cyanogaster | 1 |
Green Woodhoopoe | Phoeniculus purpureus | 2 |
Western Red-billed Hornbill | Tockus kempi | 15 |
African Gray Hornbill | Tockus nasutus | 5 |
Black-breasted Barbet | Lybius rolleti | 3 |
Fine-spotted Woodpecker | Campethera punctuligera | 2 |
African Gray Woodpecker | Dendropicos goertae | 1 |
Lesser Kestrel | Falco naumanni | 7 |
Rose-ringed Parakeet | Psittacula krameri | 20 |
Senegal Parrot | Poicephalus senegalus | 20 |
Northern Puffback | Dryoscopus gambensis | 1 |
Yellow-crowned Gonolek | Laniarius barbarus | 2 |
Yellow-billed Shrike | Corvinella corvina | 3 |
Fork-tailed Drongo | Dicrurus adsimilis | 1 |
Tawny-flanked Prinia | Prinia subflava | 1 |
Brown Babbler | Turdoides plebejus | 7 |
European Pied Flycatcher | Ficedula hypoleuca | 1 |
Scarlet-chested Sunbird | Chalcomitra senegalensis | 1 COUPLE |
Northern Gray-headed Sparrow | Passer griseus | 30 |
White-billed Buffalo-Weaver | Bubalornis albirostris | 5 |
Red-billed Firefinch | Lagonosticta senegala | 25 |
Village Indigobird | Vidua chalybeata | 1 |
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