En ce lundi 11 juillet, les conditions météos ne sont pas plus engageantes que celles d’hier. Le thermomètre affiche 7°C et le ciel est encore chargé de lourds nuages noirs. Nous tentons la péninsule de Neslandatangi en bordure du lac Myvatn. Quelques obs sympathiques comme ces Macreuses noires et leurs jeunes, 3 Plongeons catmarins dont un vocalisant ou bien ce Phalarope à bec étroit recherchant sa nourriture à terre. Il inspecte les feuilles des saules et autres plantes en bordure de la piste. C’est assez inattendu, car pour nous sudistes, les observations de cette espèce se font surtout sur les baisses en Camargue qu’il fréquente quasi-uniquement à la recherche de proies. Certainement qu’ici en Islande, la présence de nourriture facilement accessible sur la terre ferme est une invitation à la sortie des eaux. Sans cesse en mouvement et en l’absence de lumière, aucune de nos photos n’est ressortie.

Macreuses noires, Lac de Myvatn
Macreuses noires, femelles, Lac de Myvatn

C’est en quittant la péninsule, que nous croisons une Bécassine des marais, pour une fois pas vraiment farouche. Confiante dans son plumage, elle reste immobile, nous laissant tout loisir de l’observer et de la photographier. Au passage d’un Labbe parasite au dessus de nos têtes, elle se tapit puis décolle. Superbe observation !

Bécassine des marais, Lac de Myvatn
Bécassine des marais, Lac de Myvatn

Plus loin, en contrebas de la route, une famille de Courlis corlieu s’alimente dans les herbes éparses. Les adultes restent à distance tandis que les jeunes vagabondent tout en gardant le contact auditif avec les parents. Il est amusant de voir ces petites boules de plumes montées sur échasse avec leur bec en devenir, présentant le début de la courbure typique de l’espèce.

Jeune de Courlis corlieu, Lac de Myvatn
Jeune de Courlis corlieu, Lac de Myvatn
Courlis corlieu, Lac de Myvatn
Courlis corlieu, Lac de Myvatn

Nous poursuivons le tour du lac et traversons à présent un champ de lave. Le paysage est chaotique, la roche est sombre et l’on distingue par endroit les formes de la lave visqueuse qui se sont figées en s’écoulant. Malgré des coulées datant de plusieurs milliers d’années, les plantes supérieures n’ont que peu colonisé ces milieux. Pionniers parmi les pionniers, on trouve les lichens, les seuls organismes capables de se développer sur un substrat rocheux en l’absence de sol. Dépourvus de racines, les lichens saxicoles s’accrochent à la roche grâce à leur forme encroûtante ou aux hyphes qui constituent le corps de l’organisme. Le lichen est une illustration du processus de mutualisme où deux organismes s’associent afin d’acquérir des propriétés qu’ils ne pourraient avoir seuls. En l’occurrence, l’association est constituée d’un champignon et d’une algue. Le premier assure le côté squelette de l’organisme, l’absorption de l’eau, la capacité de résister à la dessication et ses sécrétions acides jouent un rôle dans la décomposition du substrat et fournissent les éléments nutritifs à l’algue. Cette dernière est capable d’assurer, grâce à la chlorophylle qu’elle contient dans ses chloroplastes, le processus de la photosynthèse. Elle élabore ainsi des composants organiques grâce à la lumière solaire et aux apports (en eau et en éléments nutritifs) en provenance du champignon. Grâce à cette association, les lichens occupent des niches écologiques très variées et sont capables de pousser dans des environnements hostiles. Ils sont particulièrement bien représentés dans les pays nordiques. On trouve même une espèce (Pleopsidium Chlorophanum) s’étant adaptée au continent antarctique, où les conditions de température, d’aridité et de radiations solaires sont extrêmes.  Ils sont les premiers maillons des successions végétales en contribuant à l’élaboration d’un sol, soit en capturant des particules de poussières entres les hyphes soit en se décomposant lentement.

Paysages autour du lac de Myvatn
Paysage d’un champ de lave autour du lac de Myvatn
Lichens autour du lac de Myvatn
Lichens autour du lac de Myvatn
Fleurs autour du lac Myvatn
Fleurs autour du lac Myvatn

En sortie du champ de lave, une Bécassine des marais se tient en évidence sur un muret de roches basaltiques noires. Il est plaisant de croiser aussi facilement ce limicole qui semble trouver autour du lac des conditions propices à la reproduction. Derrière la Bécassine, une jeune de Grive mauvis se nourrit discrètement au sol.

Bécassine des marais, lac de Myvatn
Bécassine des marais, lac de Myvatn
Grive mauvis, lac de Myvatn
Grive mauvis, lac de Myvatn

Nous quittons les abords du lac et filons en direction de volcan Krafla. Une étape intermédiaire nous donne l’occasion de visiter les solfatares, ces sortes de petits volcans d’où émanent des gaz chargées de soufre provenant des entrailles de la Terre. La production est continue et forme un nuage à l’odeur marquée (avec une légère tendance à s’incruster dans les vêtements ce qui permet de profiter de l’odeur tout au long de la journée !). On trouve aussi des fumerolles, caractérisées par des gaz s’échappant depuis une faille, une petite fissure de la roche et parfois avec des dépôts de soufre sur ses bords. Derniers témoins de cette terre vivante, les marmites de boues. Comme le disait le célèbre volcanologue Jean-marie Bardinzeff, « ça glougloute, ça crachouille ». Telles des sources d’eaux chaudes, on observe une activité continue de fines particules constituées principalement d’argiles portées à ébullition. Des poches de gaz arrivent en surface et projettent de la boue tout en dessinant des formes  plus ou moins esthétiques. La texture parait onctueuse mais il ne faut pas y toucher, la température dépasse les 100°C.

La route menant à Krafla longe une petite rivière où s’est installé un couple de Pluvier doré. A peine nous sommes nous arrêter qu’ils se mettent à alarmer. Nous apercevons furtivement un jeune se réfugier dans les saules nains où il devient parfaitement invisible.

Pluvier doré, lac de Myvatn
Pluvier doré, lac de Myvatn

Nous avions initialement prévu de randonner dans les paysages lunaires du volcan Krafla et d’en faire son ascension. Connu pour être une des zones les plus actives d’Islande, le volcan a connu de nombreuses phases d’intenses activités. Entre 1724 et 1729, 7 éruptions fissurales se sont succédées et sont connues sous le nom des « Feux de Myvatn ». La dernière éruption en date remonte à 1975 et aura durée 9 ans. Elle a donné naissance à une coulée de lave de 19 km de long qui est encore aujourd’hui chaude. On comprend mieux l’installation à proximité de la centrale géothermique de Krafla. Le ciel est toujours aussi sombre, il pleut et le sommet du volcan et dans les nuages. Pas vraiment les conditions optimales pour découvrir les coulées de lave et la caldeira de ce volcan.

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